Tout en renonçant aux doctrines du catholicisme, les réfcrmateurs anglais avaient retenu plusieurs formes de son culte et l’Eglise anglicane avait incorporé à son rituel beaucoup de ses coutumes et de ses cérémonies. On prétendait que ces questions n’avaient rien à voir avec la conscience, que ces rites, sans être enjoints par les Ecritures, n’étaient pas non plus interdits et que, par conséquent, ils étaient sans danger. On assurait que leur observance tendait à atténuer la distance séparant Rome des églises réformées et qu’elle aiderait les catholiques à accepter la Réforme.
Pour les conservateurs et les opportunistes, l’argument était concluant. Mais tous n’envisageaient pas les choses sous cet angle. Le fait même que ces observances tendaient à combler l’abîme entre Rome et la Réforme était pour plusieurs une excellente raison de les proscrire. Ils les considéraient comme des insignes de l’esclavage auquel ils venaient d’échapper et sous lequel ils n’étaient nullement disposés à se replacer. Ils affirmaient que les règles du culte ayant été fixées par Dieu, son peuple n’a pas le droit d’ajouter ou d’en retrancher quoi que ce soit. Le premier pas dans l’apostasie a été la conséquence du désir de joindre l’autorité de l’Eglise à celle de Dieu. Rome a commencé par prescrire ce que Dieu n’a pas défendu et elle a fini par interdire ce qu’il a expressément ordonné.
Bien des gens qui désiraient ardemment remonter à la pureté et à la simplicité de la primitive Eglise voyaient dans plusieurs des usages de l’Eglise anglicane des vestiges d’idolâtrie et ne pouvaient, en conscience, participer à son culte. De son côté, l’Eglise, appuyée par l’autorité civile, ne voulait souffrir aucune dissidence. La fréquentation de ses offices était exigée par la loi, et ceux qui participaient à des cultes non autorisés étaient passibles de peines d’emprisonnement, d’exil ou de mort.
Au commencement du dix-septième siècle, le souverain qui venait de monter sur le trône d’Angleterre se déclara résolu à contraindre les Puritains à « se conformer, … sous peine de bannissement ou de quelque chose de pire ». Pourchassés, persécutés, emprisonnés, sans espoir d’un avenir meilleur, plusieurs en arrivèrent à la conclusion que l’Angleterre n’était plus habitable pour ceux qui voulaient servir Dieu selon leur conscience. Quelques-uns se décidèrent à aller chercher un refuge en Hollande. Arrêtés par les difficultés, par des pertes matérielles, par des séjours en prison, par des échecs et des trahisons, ils finirent par triompher grâce à leur indomptable persévérance et trouvèrent asile sur les rives hospitalières de la République des Pays-Bas.
Dans leur fuite, ils avaient abandonné leurs maisons, leurs biens et leurs moyens d’existence. Etrangers à ce pays dont ils ne connaissaient ni la langue ni les usages, ils durent, pour gagner leur pain, chercher des occupations nouvelles. Des hommes d’âge mûr, qui avaient passé leur vie à cultiver le sol, se virent obligés d’apprendre des métiers et le firent volontiers. Bien que réduits à l’indigence, ils remerciaient Dieu des bienfaits dont ils jouissaient, trouvant leur joie dans la libre pratique de leur foi. « Se sachant pèlerins, ils ne se mettaient en peine de rien et se consolaient en levant les yeux vers le ciel, leur patrie la plus chère. »
L’exil et l’adversité ne faisaient que fortifier leur foi dans les promesses de celui qui ne les décevait pas au moment du besoin. Ses anges, à leurs côtés, renouvelaient et soutenaient leur courage. Aussi, lorsqu’il leur sembla que la main de Dieu leur ouvrait, au-delà des mers, un pays où ils pourraient fonder un Etat et léguer à leurs enfants le précieux héritage de la liberté religieuse, prirent-ils sans hésiter le chemin que la Providence leur indiquait.
Dieu avait fait passer le petit troupeau par la fournaise de l’épreuve afin de le préparer à l’accomplissement d’un grand dessein. Il était sur le point de manifester sa puissance en sa faveur et de prouver au monde, une fois de plus, qu’il n’abandonne pas ceux qui mettent en lui leur confiance. La colère de Satan et les complots des méchants allaient servir à glorifier Dieu et à mettre son peuple en lieu sûr. La persécution et l’exil avaient préparé le chemin de la liberté.
Lorsqu’ils s’étaient vus dans la nécessité de quitter 1’Eglise anglicane, les Puritains s’étaient unis entre eux par un pacte solennel. Libres serviteurs de l’Eterne1, ils s’engageaient à « marcher ensemble dans toutes les voies que Dieu leur avait fait connaître ou qu’il leur ferait connaître par la suite ». (J. Brown, The Pilgrim Fathers, p. 74.) C’était le véritable esprit de la Réforme, le principe vital du protestantisme que les Pèlerins emportaient avec eux en quittant la Hollande à destination du Nouveau Monde. John Robinson, leur pasteur, empêché providentiellement de les accompagner, leur dit dans son discours d’adieu :
« Mes frères, nous sommes sur le point de nous séparer, et Dieu sait s’il me sera jamais donné de vous revoir. Que le Seigneur en ait ainsi décidé ou non, je vous conjure devant Dieu et devant ses saints anges de ne me suivre que dans la mesure où j’ai suivi Jésus-Christ. Si, par quelque autre instrument de son choix, Dieu venait à vous faire quelque révélation, accueillez-la avec le même empressement que vous avez mis à recevoir la vérité par mon ministère ; car je suis persuadé que le Seigneur fera encore jaillir de sa Parole de nouvelles vérités et de nouvelles lumières. » (Martyn, vol. V, p. 70.)
« Pour ma part, je ne saurais assez regretter la condition des Eglises réformées qui, ayant parcouru un certain bout de chemin dans la réforme, se refusent à faire un pas de plus que leurs guides. On ne peut persuader les Luthériens de faire un pas plus loin que Luther. … Et les Calvinistes, vous le voyez, en restent là où les a laissés le grand réformateur qui, cependant, n’a pas tout vu. C’est un malheur qu’on ne saurait trop déplorer. Car si ces hommes ont été en leur temps des lampes brillantes, ils n’ont pas connu tout le conseil de Dieu ; et s’ils vivaient aujourd’hui, ils accepteraient de nouvelles lumières avec autant d’empressement que celles qu’ils ont proclamées. » (D. Neal, History of the Puritans, vol. I, p. 269.)
« Souvenez-vous de votre engagement envers Dieu et vos frères, de recevoir tout rayon de lumière, toute vérité qui, de sa Parole, pourrait jaillir sur votre sentier ; car il n’est pas possible que le monde chrétien, si récemment sorti de ténèbres profondes, soit parvenu d’un seul coup à la plénitude de la lumière. Mais prenez aussi garde à ce que vous recevez comme la vérité ; ayez bien soin de tout comparer avec les textes de l’Ecriture. » (Martyn, vol. V, p. 70, 71.)
C’est l’amour de la liberté de conscience qui poussa les Pèlerins à affronter les périls d’un long voyage à travers les mers, à braver les privations et les dangers d’un pays désert, pour aller jeter, avec la bénédiction de Dieu, les fondements d’une puissante nation sur les rivages de l’Amérique. Et pourtant, malgré leur sincérité et leur piété, ces chrétiens n’avaient pas encore réellement compris le principe de la liberté religieuse. Ils n’étaient pas disposés à concéder à d’autres cette liberté à laquelle ils attachaient un si grand prix. « Rares étaient, même parmi les penseurs les plus éminents du dix-septième siècle, ceux qui s’étaient élevés à la hauteur du grand principe renfermé dans le Nouveau Testament, et d’après lequel Dieu est seul juge de la foi. » (Id., p. 297.)
La doctrine affirmant que Dieu a donné à son Eglise le droit de dominer les consciences, de définir et de punir l’hérésie, est l’une des erreurs papales les plus invétérées. Les réformateurs, tout en répudiant le credo de Rome, ne surent pas s’affranchir entièrement de son intolérance. Les profondes ténèbres dont Rome avait enveloppé le monde au cours de sa domination séculaire n’étaient pas encore dissipées. L’un des principaux pasteurs de la colonie de Massachusetts Bay disait : « C’est la tolérance qui a rendu le monde antichrétien ; jamais l’Eglise n’a eu lieu de regretter sa sévérité envers les hérétiques. » (Martyn, vol. V, p. 335.) Un statut adopté par les colons réservait le droit de vote en matière civile aux seuls membres de la congrégation. Celle-ci était une Eglise d’Etat dans laquelle chacun était tenu de contribuer à l’entretien du culte, et où il incombait aux magistrats de veiller à la suppression de l’hérésie. Le pouvoir civil ainsi placé entre les mains de l’Eglise ne tarda pas à produire le fruit qu’il fallait en attendre : la persécution.
Onze ans après l’établissement de la première colonie, arrivait dans le Nouveau Monde Roger Williams, en quête, lui aussi, de la liberté de conscience. Mais il la concevait autrement que les Pèlerins. A l’encontre des gens de son temps, il avait compris que cette liberté est le droit inaliénable de tout homme, quelle que soit sa confession. Avide de vérité, il lui paraissait impossible, comme à Robinson, qu’on eût déjà reçu toute la lumière de la Parole de Dieu. « Williams a été le premier dans la chrétienté moderne à établir le gouvernement civil sur le principe de la liberté religieuse et de l’égalité des opinions devant la loi. » (Bancroft, Ire part., chap. XV, par. 16.) Il affirmait que le devoir du magistrat était de punir le crime, mais non de dominer sur les consciences. « Le magistrat, disait-il, peut décider ce que l’homme doit à son semblable ; mais quand il s’avise de lui prescrire ses devoirs envers son Dieu, il sort de ses attributions. L’Etat peut établir un credo aujourd’hui et demain un autre, comme cela s’est vu sous divers rois et reines d’Angleterre, et comme l’ont fait différents papes et conciles de 1’Eglise romaine, ce qui rend la croyance incertaine et donne libre cours à l’arbitraire. » (Martyn, vol. p. 340.)
La présence aux services religieux était obligatoire sous peine d’amende et de prison. Williams bravait cette loi, qu’il appelait « le pire article de la loi anglaise » . « Forcer un homme à adorer Dieu avec des personnes ne partageant pas ses croyances c’était, selon lui, une violation flagrante du droit privé ; traîner au culte des gens irréligieux et indifférents, c’était cultiver l’hypocrisie. Nul ne doit être contraint d’adorer Dieu ou de contribuer aux frais du culte. — Quoi ! s’écriaient ses antagonistes, scandalisés de sa doctrine, Jésus ne dit-il pas que l’ouvrier mérite d’être nourri ? — Assurément, répliquait-il, mais par ceux qui l’emploient. » (Bancroft, Ire part., chap. XV, par. 2.)
Roger Williams était reconnu et aimé comme un fidèle ministre de 1’Evangile. Sa haute intelligence, sa charité, son intégrité incorruptible lui avaient gagné le respect de la colonie. Mais on ne voulut pas tolérer sa ferme opposition à l’ingérence du magistrat dans le domaine de l’Eglise, ni ses plaidoyers en faveur de la liberté religieuse. L’introduction de cette nouvelle doctrine, disait-on, ébranlera les bases du gouvernement de la colonie, et on le condamna au bannissement. Williams se vit ainsi obligé de s’enfuir et de chercher, en plein hiver, un refuge dans la forêt vierge.
« Quatorze semaines durant, dit-il, par un froid glacial, j’errai sans asile et sans pain, nourri par les corbeaux du désert, et m’abritant le plus souvent dans le creux d’un arbre. » (Martyn, vol. p. 349, 350. » Il finit par trouver un refuge auprès d’une tribu indienne dont il avait gagné l’affection et la confiance en s’efforçant de lui enseigner l’Evangile.
Au bout de plusieurs mois, Williams arriva sur les rives de la baie de Narragansett, où il fonda le premier Etat des temps modernes qui ait reconnu, d’une façon complète, le droit à la liberté de conscience. Le principe fondamental de la nouvelle colonie fut ainsi formulé : « Chacun aura la liberté de servir Dieu selon les lumières de sa conscience. » (Id., p. 354.) Le petit Etat de Rhode-Island était destiné à devenir l’asile des opprimés. Son influence devait s’accroître à tel point que son principe fondamental — la liberté civile et religieuse — est devenu la pierre angulaire de la République américaine.
Dans la Déclaration de l’Indépendance, auguste document dont ils ont fait la charte de leurs libertés, les fondateurs de la grande République disent : « Nous maintenons — à titre de vérités évidentes — que tous les hommes sont créés égaux, et que le Créateur leur a donné des droits inaliénables parmi lesquels se trouvent : la vie, la liberté et la recherche du bonheur. » D’autre part, la Constitution américaine garantit l’inviolabilité de la conscience dans les termes les plus positifs. Elle dit : « Aucune formalité ou croyance religieuse ne pourra jamais être exigée comme condition d’aptitude à une fonction ou charge publique aux Etats-Unis. » « Le Congrès ne pourra faire aucune loi relative à l’établissement d’une religion ou qui en interdise le libre exercice. »
« Les auteurs de la Constitution ont reconnu le principe immortel en vertu duquel les relations de l’homme avec son Dieu — donc les droits de la conscience — sont inaliénables et échappent à toute législation humaine. Il n’était pas nécessaire d’argumenter longuement pour établir cette vérité dont chacun est conscient dans son for intérieur. Cette certitude a soutenu les martyrs au milieu des tortures et des flammes des bûchers. Ils croyaient que les devoirs envers Dieu priment les lois humaines et que l’homme n’avait aucun droit sur leur conscience. C’est là un principe inné que personne ne peut extirper. » (Congressional Documents - U.S.A.-, Ser. 200, Doc. 271.)
Lorsqu’on apprit en Europe qu’il existait un pays où chacun pouvait jouir du fruit de ses labeurs et vivre selon sa conscience, des milliers de gens affluèrent sur les rivages du Nouveau Monde. Les colonies se multiplièrent rapidement. « Par une loi spéciale, le Massachusetts offrit bon accueil et assistance, aux frais de l’Etat, aux chrétiens de toute nationalité qui fuiraient à travers l’Atlantique ,,pour échapper à la guerre, à la famine ou à l’oppression de leurs persécuteurs". Ainsi, les fugitifs et les opprimés devenaient, de par la loi, les hôtes de la nation. » (Martyn, vol. V, p. 417.) Dans les vingt années qui suivirent le premier débarquement à Plymouth, un nombre égal de milliers de Pèlerins s’établirent en Nouvelle-Angleterre.
En retour de cette liberté, les immigrants s’estimaient heureux de gagner leur pain quotidien par leur travail et leur sobriété. « Ils ne demandaient au sol qu’une rémunération raisonnable de leur labeur. Sans se laisser leurrer par des visions dorées, … ils se contentaient des progrès lents, mais constants de leur économie sociale. Ils enduraient patiemment les privations de la vie du désert, arrosant de leurs larmes et de leurs sueurs l’arbre de la liberté, qui enfonçait dans le sol ses profondes racines. »
L’Ecriture sainte était la base de leur foi, la source de leur sagesse, la charte de leurs libertés. Ses principes, diligemment enseignés dans la famille, à l’école et à l’église, portaient comme fruits l’industrie, l’intelligence, la chasteté, la tempérance. On eût pu passer des années dans les colonies des Puritains « sans rencontrer un ivrogne, sans entendre un blasphème, sans voir un mendiant ». (Bancroft, Ire., chap. XIX, par. 25.) Ce fait démontrait que les principes de la Bible offrent les plus sûres garanties de la grandeur nationale. Les colonies, d’abord faibles et isolées, finirent par devenir une puissante fédération d’Etats, et le monde a vu avec étonnement se développer, dans la paix et la prospérité, une « Eglise sans pape, et un Etat sans roi » .
Mais les foules sans cesse plus nombreuses, attirées vers les rives de l’Amérique, étaient poussées par des mobiles bien différents de ceux des premiers Pèlerins. La foi et les vertus des premiers temps, bien que continuant à exercer sur la masse une influence bienfaisante, diminuèrent dans la mesure où augmentait le nombre des nouveaux venus, uniquement avides d’avantages matériels.
Les règlements de la première colonie attribuaient les charges publiques aux seuls membres de l’Eglise ; les résultats en furent pernicieux. Cette mesure, considérée comme propre à maintenir l’intégrité de l’Etat, entraîna la corruption de l’Eglise. Une simple profession de religion étant suffisante pour aspirer à une charge publique, un grand nombre de gens étrangers à la vie chrétienne entrèrent dans l’Eglise. Peu à peu, les églises se remplirent d’inconvertis. Dans le corps pastoral même, des hommes, non seulement enseignaient l’erreur, mais ignoraient entièrement la puissance transformatrice du Saint-Esprit. Une fois de plus, l’histoire démontrait les funestes conséquences du régime — introduit sous Constantin — de l’édification, avec l’appui du pouvoir séculier, de l’Eglise de celui qui a dit : « Mon royaume n’est pas de ce monde. » (Jean 18 : 36.) L’union de 1’Eglise et de l’Etat, à quelque degré que ce soit, si elle paraît rapprocher le monde de l’Eglise, n’a en réalité d’autre conséquence que de mondaniser 1’Eglise.
Le grand principe si noblement soutenu par Robinson et Roger Williams, à savoir que la lumière de la vérité est progressive et que le chrétien doit se tenir prêt a recevoir tout rayon nouveau émanant de la Parole de Dieu fut perdu de vue par leurs descendants. Les Eglises protestantes d’Amérique, comme aussi celles d’Europe, qui ont eu l’insigne privilège de participer aux bienfaits de la Réforme, n’ont pas continué d’avancer dans cette voie. De loin en loin, des hommes se sont levés pour proclamer des vérités nouvelles et dénoncer d’anciennes erreurs ; mais les masses — suivant l’exemple des Juifs au temps de Jésus et des peuples restés catholiques au seizième siècle — n’ont pas voulu recevoir autre chose que ce que leurs pères avaient cru et se sont refusées à modifier leur manière de vivre. En s’attachant à des erreurs et à des superstitions qu’on eût délaissées si l’on avait reçu les lumières de la Parole de Dieu, on a fait dégénérer la religion en formalisme. Ainsi, l’esprit de la Réforme s’est graduellement affaibli. Envahi par la mondanité et la torpeur spirituelle, attaché à l’opinion publique et aux théories humaines, le protestantisme en est venu à avoir tout aussi besoin de réforme que le catholicisme aux jours de Luther.
La vaste diffusion des Ecritures au commencement du dix-neuvième siècle et la grande lumière ainsi répandue sur le monde n’ont pas été suivies d’un progrès correspondant dans la vérité révélée ou la vie religieuse. Ne pouvant plus, comme dans les siècles passés, cacher au monde la Parole de Dieu désormais à la portée de tous, Satan a imaginé une tactique nouvelle. Il a poussé un grand nombre de gens à faire peu de cas de la Bible. Ainsi, sans se mettre en peine d’interroger diligemment les Ecritures, on a continué d’en accepter de fausses interprétations et de conserver des doctrines dépourvues de base scripturaire.
Voyant qu’il ne réussirait pas à supprimer la vérité par la persécution, Satan a eu de nouveau recours à l’expédient des compromis qui lui avait si bien réussi aux jours de Constantin, et qui avait abouti à la grande apostasie. Il a amené les chrétiens à contracter alliance non plus avec des païens proprement dits, mais avec un monde que le culte pour des choses d’ici-bas a rendu tout aussi idolâtre que les adorateurs d’images taillées. Et les résultats de cette union n’ont pas été moins pernicieux que dans les siècles précédents. Le luxe et l’extravagance ont été cultivés sous le manteau de la religion et les églises se sont mondanisées. Satan a continué de pervertir les enseignements de l’Ecriture ; des traditions funestes à des millions d’âmes ont jeté de profondes racines dans les cœurs, et l’Eglise, au lieu de maintenir la foi primitive, a soutenu et revendiqué ces traditions. Ainsi se sont effrités les principes en faveur desquels les réformateurs ont tant travaillé et tant souffert.